Art & Architecture
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Édifice iconique du monument, le châtelet d'entrée a traversé le temps, et les guerres... De la splendeur de la Renaissance aux combats pour la Libération, il témoigne de l'histoire séculaire du Château de Carrouges.
On ne peut pas le manquer ! Le châtelet du domaine de Carrouges est un petit bijou d'architecture.
Photographié sous toutes les coutures par nos visiteurs, il est, sans conteste, la "carte postale" du monument.
Depuis le village il attire le regard, invitant à descendre dans le vallon. Petit bâtiment avec un corps central cubique dont le rez-de-chaussée est percé d'un passage, le châtelet marque l'entrée du parc Château de Carrouges.
Ses fenêtres richement décorées témoignent d'un art de transition entre le style gothique flamboyant et les premières formes de la Renaissance.
Édifié dans le premier tiers du XVIe siècle, il est considéré comme le premier exemple d'une architecture renaissante en Normandie !
Le châtelet fait aussi figure d'expérimentation : sur le domaine, c'est la première fois que l'on utilise un appareillage de briques roses et noires, permettant un jeu de motifs qui anime la façade (losanges, cœurs, chevrons).
Cette idée fera florès à Carrouges : elle est reprise cinquante ans plus tard pour la construction des ailes classiques du château, donnant à l'ensemble du domaine une unité de style malgré la longue période de construction.
On doit la construction du châtelet à Jean Le Veneur, évêque de Lisieux et cardinal. Il est le fils de Marie Blosset et Philippe Le Veneur de Tillières, seigneurs de Carrouges.
Ouvrez l'oeil !
Sur le bas des tours, les briques noires dessinent de manière stylisée la mitre et la crosse épiscopale. Mais le chapeau cardinalice n'apparaît pas : cela signifie que le châtelet est construit après que Jean Le Veneur a été fait évêque, mais avant qu'il soit élevé au rang de cardinal, soit entre 1505 et 1533 .
Le cardinal Jean Le Veneur n'est pas n'importe qui... Confident et conseiller du roi François Ier, abbé commendataire de l’abbaye du Mont-Saint-Michel, il est un personnage éminent de la Renaissance.
C'est lui qui présente Jacques Cartier au roi et finance son expédition vers le Canada. C'est lui aussi qui couronne la reine Éléonore en sa qualité de grand aumônier de France.
Ami des arts et des lettres, le cardinal est cité par Rabelais dans le livre IV de Pantagruel et Carrouges lui aurait servi de modèle pour son abbaye de Thélème où l’on goutte à profusion les joies les plus raffinées.
Comme de nombreux châteaux en France, Carrouges, qui est propriété de l'État depuis 1936, est réquisitionné à l'approche du deuxième conflit mondial pour mettre à l'abri des œuvres d'art.
Le châtelet accueille ainsi pendant quelques mois des collections du Musée de Rouen.
En 1944, les combats pour la Libération sont rudes dans le bocage... Carrouges est sur la route de la désormais célèbre "2e D.B." du Général Leclerc.
Le château est aux premières loges : un incendie ravage entièrement la toiture du châtelet. Il renaîtra de ses cendres lors des grands travaux de restauration des années 1950.